dans une sorte de désordre aidé
Texte extrait du catalogue d'exposition par Jean-Christophe Arcos, commisaire de l'exposition
Pierre Cailloux s'attaque à la figure de l'artiste et aux mythes qui l'entourent, pour en souligner la fragilité autant que
la puissance. Il utilise les indices comme autant de cailloux semés sur son chemin, ce dernier se situant sur une crête
entre emprunts à l'histoire de l'art et affirmation subjective d'un artiste d'aujourd'hui.
Élaborant des pièges à représentations,
il semble montrer la lune pour qu'on regarde le doigt. Dans ce geste démlurge, l'objet n'apparaît que pour révéler son
incomplétude : la nature autofictionnelle se nourrit de nomadisme, le ready-made devient tautologie, la maquette renvoie,
mais imparfaitement, à l'espace qu'elle sort de son contexte.
D’un autre point de vue
Texte extrait du catalogue d’exposition «A suivre... 2017»
Mercredi après-midi, j’ai pris le thé avec Pierre, il m’a raconté 2 ou 3 choses qui pour moi forment une bonne partie
de ce que l’on pourra appeler, son travail.
Il me raconte le chemin qu’il venait de faire, de chez lui jusqu’au
café, en me décrivant ses pensées. Je n’ai pas tout de suite compris où il voulait en venir. Qu’est-ce que tout
ça voulait dire. Ce monologue chaotique qui profusait dans plusieurs sens simultanément. Je me suis même perdu
dans son histoire, j’ai eu l’impression de vivre certains passages. Mais de façon discontinue, entre plusieurs
flux de pensées, en essayant de m’accrocher aux éléments que j’arrivais à comprendre. En y repensant, j’en ai
même surement inventé. Un certain moment, il rentrait dans une cordonnerie, et je m’y suis retrouvé. J’étais
pris à l’intérieur de la réalité qu’il me contait. J’ai passé un moment dans cet endroit, je ne sais plus tellement
ce que j’y ai fait. Je suis ressorti et à peine quelques mots plus loin j’étais devant le café, avec un souvenir
un peu flou de ma balade. Je me suis dit que c’était un bon exemple pour parler de mon travail, j’allais lui
raconter ça autour d’un thé.
extrait du catalogue d'exposition :«A suivre... 2017»
Confession d’une démarche de travail
Texte extrait d’un dialogue imaginaire, dans une vague pensée.
-Je veux dire, si tu devais un peu m’expliquer ce que tu fais avec tout ça, ce que ça veut dire ?
Ce n’était
pas simple. Tout s’agitait dans ma tête comme si il n’y avait pas vraiment de réponse.
-Voilà, ma recherche,
c’est une sorte d’exploration sur plusieurs réalités à la fois, une exploration de la pensée qui se divise en
d’infinies combinaisons, et tous ces voyages deviennent matérialité quelque part. Des fois, par le récit, l’écrit,
la vidéo et d’autres fois, par des expérimentations, des installations, des objets. Mais ce n’est pas fixe. Tout
bouge tout le temps. Ce qui compte vraiment, c’est le lien entre tout ça. Passer de réalité en réalité pour arpenter
les plans. Au moment où j’ai répondu, cela m’a paru une des plus claires et concises explications que je n’eus
donné de ma pratique.
-Mais, je croyais que tu voulais parler de rôle et de poésie, je comprends pour l’écriture
oui… mais cette idée de boucle…
Et pourtant il n’a pas eu l’air de comprendre. Encore quelqu’un que j’ai
perdu, qui s’est perdu, et qui cherche le chemin entre ce que j’ai raconté, et ce qu’il a vu.
Dans tout cela
Texte extrait de la préface de Nicolas Blanc; de l’édition « Les pensées de mes pensées », mémoire de DNSEP de Pierre Cailloux.
La fragilité dans la fragilité et le média dans le médium. Qui est l’artiste sinon un scribe, penseur marginal, messager
et fonctionnaire, représentant de l’art dans l’art ? Ermite néo-contemporain, avec pour mission de contourner
les obstacles, diluer les limites, mettre en forme le rêve être attentif à l’écriture, détruire prématurément
toute possibilité d’entente, questionner la modernité, interroger l’acteur en action dans chacun d’entre nous.
En finir avec l’informe néo-néo-contemporain ou le contemporain néo-informe pour ressourcer, réactualiser la
pensée cartésienne et assembler les pièces de cette expérience qu’est la pratique, expérience elle-même impalpable,
pratiquement impropre à la consommation, si ce n’est en tant qu’objet détourné de son objectif, qu’acteur dans
le film.
Circonscrire le créateur à son contexte, tel est le chemin d’une éducation parallèle, souterraine
et imperceptible. Tâche imprescriptible imposée au créatif, celui-ci doit s’arroger le droit d’user de son instinct
afin de pallier à une hypothèse : celle de la dégénérescence de l’artiste dans l’artiste et de la déliquescence
du rêve. Par une sorte d’inception propre à toute réalité parallèle crée de l’inconscient d’un cerveau malade,
le travail doit s’imbriquer dans cette pseudo-réalité pour mieux l’exploiter. Faire usage du crypto-subconscient
et de la sous réflexion (introspection par la méthode) peut amener à percevoir d’autres réalités, d’autres hypothèses.
-Le 8 Novembre 2016, 19 h 35 : A bord du train en direction de Caen.
Il me questionne sur ma prochaine vidéo, je n’ai pas encore monté celle des histoires de films imaginaires, je ne sais même pas si j’ai fini de la tourner. J’ai réécrit le texte pour mes pensées numérisées, c’est surement elle ma prochaine vidéo. Mais il faut que je me concentre sur le présent d’abord, sinon je n’avancerai pas. Je remarque que mon travail, passé, présent, et futur est en quelque sorte mélangé, je ne le dissocie pas. Il ajoute que ce n’est pas le cas uniquement pour mon travail, mais pour un peu près tout ce que je fais. Particulièrement pour mes idées, elles s’organisent de façons chaotiques. C’est sûrement pour ça que je n’arrive pas à faire le point. On se questionne ensuite sur cette notion d’entrecroisement des idées, des pensées, des choses immatérielles. Jusqu’où les choses peuvent s’emmêler, s’intriquer. Dans la réalité, il y a des barrières qui nous empêchent de voyager à notre grès au travers du temps et de l’espace, mais dans la pensée les barrières s’effacent.
Schéma de la réalité
Pour mettre en relation les dimensions qui ne cherchent qu’à se rejoindre, j’ai créé des superstructures. Chacune d’elle est un espace où convergent plusieurs plans, une porte qui relie entre eux les morceaux de ce tissu complexe que forme la réalité. Au-delà des étranges sensations que l’on peut éprouver en expérimentant ses espaces-frontières, elles permettent de concentrer les matières et les pensées. Grâce à elles, j’ai pu définir un schéma reliant les forces qui façonnent ma vision de la réalité.